Article Lecture zen Après avoir rappelé le contenu du terme « biodiversité », cet article présente les connaissances relatives aux variations de la biodiversité, en France, entre le dernier maximum glaciaire et le maximum holocène. Il fournit ensuite quelques exemples d'impacts du réchauffement climatique actuel sur les écosystèmes et termine par une comparaison entre les réchauffements passé et actuel, permettant une projection vers le futur. IntroductionLa biodiversitéLa biodiversité peut être définie comme l’ensemble de la diversité du vivant, à savoir :
Robert Barbault préfère parler de « tissu vivant de la planète » pour mieux prendre conscience des interactions. Le réchauffement climatiqueLe réchauffement actuel de la planète est un fait : entre 1900 et 2007, la température moyenne du globe a augmenté de 1 °C (15 °C de température moyenne pour 2006) et le niveau moyen des océans est monté de 15 cm. La Terre a connu de nombreuses variations climatiques avec des fluctuations de température de ± 15 °C par rapport à l’actuel et des changements du niveau marin d’au moins ± 200 m au cours des 650 derniers millions d’années. À une échelle plus « humaine », le dernier maximum glaciaire date de 18 ka (1 ka = 1000 ans), période à laquelle la température moyenne de la Terre était alors de 4 à 5 degrés inférieure à l’actuelle. En seulement 5 000 ans, le principal de la déglaciation était fait. Durant cette tendance générale, après la première période de forte déglaciation, plusieurs petits épisodes chauds ou froids ont eu lieu. Le passé : dernière déglaciation et biodiversitéLe dernier maximum glaciaireLe dernier maximum glaciaire (DMG) a 18 ka. Un réchauffement climatique général a ensuite entraîné une déglaciation continue jusqu’à aujourd’hui, avec un maximum de réchauffement il y a environ 8 ka (maximum holocène, ou MH). La température moyenne au MH est de l’ordre de 2 °C supérieure à l’actuelle. Comparaison de la faune et de la flore en France entre – 18 ka et – 8 kaDes «
Cartes des environnements du monde pendant les deux derniers extrêmes climatiques (CLIMEX) » ont été publiées conjointement par l’ ANDRA (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) et la CCGM (Commission de la carte géologique du monde). La France au dernier maximum glaciaire (18 000 ± 2 000 ans BP) La France à l'optimum climatique holocène (8 000 ± 1 000 ans BP) Entre le DMG et le MH, le niveau de la mer est remonté de -120 m à -25 m par rapport
à l’actuel. En effet, des calottes glaciaires ayant pu persister en Amérique du Nord jusqu’à -5 ou -6 ka, le niveau marin au MH est plus bas qu’à l’actuel, pourtant plus froid. Certains végétaux ou associations végétales disparaissent du territoire (comme la steppe), d’autres voient leur extension limitée aux zones d’altitude (comme la toundra alpine ou le pin). Les espèces « disparues » perdurent cependant aujourd’hui plus au Nord. Concernant les animaux, certains disparaissent de France mais perdurent dans les régions plus septentrionales, voire boréales actuelles : le phoque moine, le renne, le renard polaire, par exemple. D’autres animaux disparaissent entre ces deux périodes : le mammouth, le lion des cavernes, la hyène des cavernes. Certains animaux ont ainsi migré en même temps que se déplaçaient les écosystèmes favorables. Les causes de la disparition du mammouth il y a environ 12 ka, bien que discutées, semblent elles aussi liées aux changements climatiques ; la prédation par l’Homme étant à l’époque vraisemblablement beaucoup trop limitée pour causer l’extinction de l’espèce. On peut déjà remarquer que l’échelle à laquelle on se place est importante. La disparition locale d’une espèce ne signifie pas nécessairement baisse de la biodiversité, si celle-ci perdure par ailleurs suite à une migration ou du fait de l’existence d’une occupation spatiale initialement très vaste. Cependant, certaines espèces ont bel et bien disparu lors de cette phase de réchauffement climatique. L’adaptation des écosystèmes aux variations climatiques dépend, entre autres, de la capacité de mobilité de ses constituants. Pour les animaux, la mobilité est liée à la mobilité des individus et est alors limitée par les barrières naturelles (fleuves, montagnes). Chez les végétaux, bien que les individus soient immobiles, la mobilité des espèces est assurée lors de la reproduction (nombreuses spores ou graines « voyageuses »). Ainsi, le réchauffement moyen entre le DMG et le MH (6 à 7 °C à l’échelle globale, et environ 20 °C à l’échelle de la France, en 10 ka) a été suffisamment important pour modifier en profondeur la répartition des écosystèmes, mais certainement suffisamment « lent » pour maintenir la biodiversité. Seules les espèces les plus fragiles ont pâti de ce réchauffement climatique général. L’actuel : quelques exemples de l’influence du réchauffement climatique actuel sur les écosystèmesLa température est un paramètre abiotique fondamental qui règle de nombreux processus du vivant. Le climat, qui intègre la température ainsi que de nombreuses autres variables abiotiques, elles aussi, influence de manière très importante la vie des organismes et les relations que ces organismes entretiennent dans le cadre des écosystèmes. Modifications des aires de répartitionParmi les premiers symptômes du réchauffement climatique reconnus en tant que tels, on trouve tout d’abord les modifications d’aires de répartition. En effet de nombreux organismes, notamment ectothermes, ont des limites septentrionales et méridionales de répartition géographique fixées par des isothermes. Déplacement géographique de l'aire de distribution d'un Nymphaliné, le tircis, (Pararge aegeria), en Grande-Bretagne, au cours du 20e siècle. Les cellules indiquent la présence d'au moins une population de tircis relevée lors d'un suivi national entre 1915 et 1939
(vert foncé), entre 1940 et 1969 (rouge) et entre 1970 et 1977 (bleu). Ce type d’étude a concerné tous types de taxons et il a été montré, par exemple, que la croissance végétale avait augmenté aux hautes latitudes (Myneni et al, 1997) [2]. Il faut remarquer que les déplacements d’aires mis en évidence représentent des dynamiques de colonisations/extinctions en limite de distribution
ou des déplacements « réels » d’individus par migration. Un autre exemple de modifications récentes des aires de répartition de certaines espèces ou de modifications de la biodiversité spécifique en un lieu donné (dont tout laisse à penser qu’elles sont en relation avec la modification du climat) est fourni avec les diatomées. Une étude de Coste et Ector (2000) [3] a ainsi montré que, depuis 20 à 30 ans, il y a eu apparition et/ou prolifération, dans les cours d’eau français, de plusieurs espèces de diatomées, notamment d’origines tropicales ou subtropicales, considérées comme de bons indicateurs de l’augmentation de la température de l’eau de surface. L’arrivée de nouvelles espèces de diatomées en France peut avoir différentes origines qui ne sont pas nouvelles : l’eau et la pluie, les insectes aquatiques, les oiseaux migrateurs, la navigation et les activités humaines, les espèces végétales ou animales introduites. En revanche, pour que les nouvelles espèces puissent s’acclimater, il faut qu’elles y trouvent les conditions nécessaires à leur survie, c’est ce qui en fait de bons indicateurs d’éventuelles modifications de l’environnement. Pour citer un exemple précis, on parlera de Diadesmis confervacea (figure ci-dessous), diatomée thermophyle considérée comme étant d’origine tropicale, et qui est à présent largement distribuée de par le monde, y compris dans les régions tempérées. Décrite en Europe depuis plus d’un siècle dans des lieux particuliers tels des serres de jardins botaniques ou des sources thermales chaudes, elle est décrite pour la première fois en France, durant les étés 1972 à 74, dans les rejets d’eau chaude de la centrale thermique EDF de Porcheville, donc en Île-de-France, puis en 1976 dans la Loire, en aval de la centrale nucléaire de St-Laurent-des-Eaux près d’Orléans. On voit donc clairement l’association entre cette diatomée et la température de l’eau. Depuis les années 90, cette espèce est régulièrement décrite dans de nombreux cours d’eau, le plus souvent situés au sud de la Loire, non nécessairement associée avec une source locale d’eau chaude (Adour, canal de la Robine, Charente, Dordogne, Isle, Canal du Jard, Indre, Loire [site EDF de Saint-Laurent-des-Eaux], Moine, Vendée). Microphotographies de Diadesmis confervacea Les photos A sont des vues valvaires prises en microscopie optique (MO), les photos B ont été prises en microscopie électronique à transmission (MET) et les photos C sont des vues connectives prises en MO. D’autres espèces tropicales thermophiles telles Hydrosera triquetra et Capartogramma crucicula (voir figures ci-dessous ) se sont également implantées en France assez récemment. Microphotographies de Hydrosera triquetra Vues valvaires et connective prises en microscopie électronique à balayage (MEB). Microphotographies de Capartogramma crucicula Les photos A ont été prises en MO, la photo B en MET. La figure ci-dessous montre la distribution observée en France pour ces trois espèces. Distribution actuelle (en 1999 - 2000), en France, de différentes espèces de diatomées thermophiles, d'origine tropicale. Modification des cycles de vieEn second lieu, le réchauffement climatique actuel entraîne des modifications dans la
disposition temporelle des étapes du cycle de vie des organismes. Évolution des anomalies temporelles des dates de quelques phénophases en relation avec deux variables climatiques : l'anomalie de température printanière et l’oscillation nord-atlantique (Index NAO) Anomalies temporelles = variations par rapport à la moyenne. Dans le cas des modifications phénologiques (étude de l’apparition d’événements périodiques déterminée par les variations saisonnières du climat) du cycle de vie des organismes, on trouve aussi des espèces capables de répondre aux modifications en avançant leur
phénophase et d’autres qui en sont moins capables. Corrélation, chez différentes populations hollandaises de gobemouche noir (Ficedula hypoleuca), entre la tendance démographique à long terme et : (a) la date du pic d’abondance de chenilles (la ressource principale de l’oiseau), (b) le coefficient de régression entre date de ponte et température printanière moyenne. On constate que les populations en déclin sont celles qui subissent un pic très précoce de leurs ressources et qui n’arrivent pas à pondre plus tôt (coefficient de régression plus proche de 0). Enfin, nous avons constaté que le sort démographique des espèces face au changement climatique ne dépendait pas uniquement de l’espèce elle-même mais plus largement de toutes les espèces ayant des liens
communautaires avec elle. En d’autre termes, pour bien mesurer les conséquences du réchauffement climatique sur la biodiversité, il faut tenir compte des réponses relatives des espèces et des liens de prédation, de compétition, de facilitation, qui les unissent au sein des écosystèmes en des réseaux trophiques complexes. Conséquences du changement climatique visibles en FrancePour terminer, considérons les
conséquences telles qu’elles sont appréhendées en France. Relation entre la résilience à l’anomalie de température et l’amplitude thermique rencontrée par l’espèce sur la partie européenne de son aire de répartition Relation entre la résilience à l’anomalie de température (= coefficient de régression entre la variation du taux de croissance
d’une espèce entre 2003 et 2004 et l’anomalie de température estivale) et l’amplitude thermique de l’aire de répartition de l’espèce. Le futur : conséquences certaines… précision incertaineLes prévisions du GIEC pour le réchauffement durant le siècle à venir sont de l’ordre de 1,8 à 4 °C, selon les scénarios envisagés pour le développement des activités humaines. Cela nous mène à un réchauffement minimal de près de 3 °C en 2 siècles (1900-2100). Comparé aux 6 à 7 °C, à l’échelle globale, entre le DMG et le MH, soit en 10 000 ans, le réchauffement actuel (1,5 °C par siècle en moyenne) semble beaucoup plus rapide que pour l’intervalle DMG-MH (0,07 °C par siècle en moyenne). Même avec des prévisions fiables sur les variations
de température à l’échelle de la Terre, il reste très difficile de prévoir les impacts locaux avec autant de précision. Cependant, grâce à une meilleure compréhension des phénomènes météorologiques et climatiques actuels, les grandes lignes des changements climatiques régionaux peuvent être déterminées. En ce qui concerne l’espèce humaine, elle est aujourd’hui adaptée à presque tous les écosystèmes (sauf les plus extrêmes) et sa population est importante. Biologiquement, l’espèce a de très bonnes chances de survie, a priori, mais les difficultés, si elles ne sont pas biologiques, seront liées aux « sociétés humaines ». Ainsi, ce sont elles qui devront s’adapter et faire face (en plus de la crise énergétique en cours) au réchauffement climatique et à ses conséquences : immigration « climatique », conflits territoriaux, bouleversement des économies (ressources agricoles), montée du niveau marin, augmentation de l’intensité et de la fréquence des aléas climatiques… Référence
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Continuer à lireQuitter la lecture zen Quel est l'influence du climat sur la biodiversité ?Perturbation des écosystèmes, acidification des océans, suppression d'espèces ou au contraire prolifération d'autres.... Le réchauffement climatique perturbe et menace le monde du vivant.
Quel rapport établit entre le climat et le monde vivant ?Le lien entre monde vivant et climat est très souvent présenté au prisme de la vulnérabilité : les organismes « subissant » les variations du climat qui sont autant de facteurs de stress. Moins connue en revanche est la capacité des êtres vivants à modifier leur environnement.
Quel est le lien entre la biodiversité et l'écosystème ?La biodiversité et les écosystèmes sont étroitement liés. Comme nous l'avons vu, les écosystèmes font partie intégrantes de la biodiversité. Les deux termes ne s'opposent pas, ils sont inséparables l'un de l'autre. La biodiversité comprend donc tous ces différents écosystèmes.
Quelle est la relation entre le climat et leau ?Le cycle de l'eau influe directement sur le climat local, ou microclimat. Plus il y a d'eau dans l'atmosphère, plus ses effets modérateurs sur les températures et les microclimats sont importants, et moins les événements climatiques extrêmes sont violents.
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